Il me reste encore 4 ans à me détruire ainsi pour terminer ma spécialité médicale
J’ai un parcours un peu insolite. Je suis africaine et j’ai tout d’abord fait mes études de médecine en Afrique (pas exceptionnel pour autant…quand j’y pense!) Ensuite, je suis venue en Europe pour poursuivre une spécialité avec une bourse. Cependant, cette dernière était largement insuffisante et j’étais en permanence sans le sou, car mon pays d’expatriation a un niveau de vie bien supérieur à celui d’où je venais et même de la France. Je ne mangeais pas à midi afin de boucler les fins de mois. J’en arrivais même à ne pas pouvoir payer les assurances mensuelles extrêmement élevées de mon « pays d’accueil ».
De plus, le droit à l’aide sociale m’était refusé.
Interdit d’accepter des gardes
En effet, dans ce pays, l’on m’a attribué d’office un statut qui implique, d’une manière paradoxale, d’être soit un docteur en médecine, soit une étudiante en médecine selon la situation du pays et ce qui l’arrange. De plus, le permis de travail qui m’est octroyé ne m’autorise à travailler que dans le poste pour lequel j’avais postulé au départ. Il m’est donc interdit de prendre des petits jobs en plus, et même d’accepter des gardes dans ma propre spécialité en médecine.
Je travaille à l’hôpital gratuitement pour effectuer le même travail que mes collègues rémunérés alors que je suis aussi médecin. Je vis très mal cette injustice, cette aberration, cette utilisation, voire cette manipulation, car je n’ai aucune faveur ou autre aide. Je me sens exploitée par un pays qui, d’un autre côté, dénonce haut et fort l’exploitation humaine, comme ils disent eux-mêmes. Je mets l’accent sur cet état de fait, car c’est une période si difficile pour moi. Je voudrais pouvoir oublier, mais comment faire ? Comment accepter de vivre une telle exploitation pratiquée sans remords et sans vergogne. Alors je supporte, car j’attends encore d’avoir en main mon diplôme de spécialisation qui est en cours d’établissement. Je supporte cette injustice, parfois ce harcèlement dans les demandes incessantes de ce pays comme s’il voulait me faire payer le fait que j’y suis.
Cependant, la souffrance d’être étrangère ici, et d’être traitée en être inférieur pour le seul fait de n’avoir pas effectué d’études ici, est vraiment insupportable à vivre.
Un hôpital maltraitant son personnel
Pourtant, je dois subir et supporter cette maltraitance psychologique. Il me reste encore 4 ans à me détruire ainsi, au minimum, pour terminer ma spécialité médicale. 4 ans de souffrance. Psychologiquement, je me sens en position de faiblesse, de doutes. Je n’ai pourtant pas le choix. Il m’est interdit d’inviter mes enfants car je ne remplis pas les critères financiers suffisants. Je me suis même vue demander une fois par un collègue pourquoi je voulais les voir! Demander ça à une mère! On peut être africaine, étudiante, expatriée et pourtant toujours mère!
C’est tellement long, tellement douloureux que c’est difficile pour moi d’écrire. Pour moi, toute cette période n’aura été que synonyme de souffrance morale et psychologique.
Je tiens le coup. Ils ne m’ont pas encore cassée. Dieu merci, mais jusqu’à quand?
Je souhaite encore aller de l’avant et surtout quitter ce pays. Je voudrais rentrer chez moi, lorsque j’aurai fini ma médecine. Je prépare mon futur retour, mais impossible d’être aidée pour ramener quelques instruments de travail dans mon pays afin d’accéder à un minimum de technicité dans ma pratique.
J’espère que je pourrais communiquer un peu d’espoir à mes collègues dans cet incroyable réel. Moi je me bats contre l’adversité et je pense à ceux qui se désespèrent.
Merci à vous de me donner la possibilité de m’exprimer.
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