Le transfert
Terme à l’origine psychanalytique qui a vu son utilisation grandement s’élargir dans les professions d’aide et de soins. Il est donc de plus en plus galvaudé dans les médias.
Selon S. Freud, « On appelle « transfert » la caractéristique frappante des névrosés à développer vis-à-vis de leur médecin des rapports affectifs tendres ou hostiles, qui ne sont pas fondés dans la situation réelle, mais proviennent de la relation des patients à leurs parents (complexe d’Œdipe). Le transfert prouve que même l’adulte n’a pas surmonté son ancienne dépendance infantile ; elle coïncide avec le pouvoir que l’on a appelé « suggestion » ; seul son maniement, que le médecin doit apprendre, le rend capable d’amener le malade à surmonter ses résistances intérieures et à supprimer ses refoulements ». (note de l’auteur : Il faut noter qu’à l’époque de S.Freud, seuls les docteurs en médecine avaient accès aux patients et notamment ceux atteints de troubles psychologiques)
(S.Freud (1926), Psycho-Analysis, in Résultats, idées, problèmes, II, Puf, 1985, p.153-160)
C’est, en fait, la répétition de schémas relationnels appartenant au passé du patient à travers une relation avec une personne présente. C’est à dire que c’est le lien que le patient instaure avec son psychologue thérapeute ou psychanalyste et qui est modelé directement par la tonalité de son vécu relationnel à ses parents ou dans des situations traumatisantes pour lui. Il met donc en mouvement des affects issus de l’organisation fantasmatique inconsciente de l’histoire infantile.
Processus psychique inconscient
C’est un processus psychique complètement inconscient.
En séance, le patient va adopter des attitudes, vivre des peurs, sentir certaines émotions (trahison, colère…), perpétrer tout un comportement, qu’il aura déjà eu dans son passé, ou voulu avoir avec certaines personnes de son entourage qui lui étaient importantes au niveau de l’implication relationnelle.
Il y a donc déplacement d’une relation déjà vécue, sur une personne qui n’est pas concernée en fait. On pourrait dire qu’il y a « erreur sur la personne » destinataire. Cependant, cette personne portent certaines équivalences symboliques pour le psychisme de l’individu vivant le transfert.
Des attitudes transférentielles peuvent aussi se produire dans la vie de tous les jours, et ceci d’une manière inconsciente.
Par exemple, il est fréquent que le gendarme, le juge, le contrôleur, l’examinateur rappellent le rôle paternel en tant que « poseur de la loi », « référent moral » ou peut-être « persécuteur » selon les expériences de l’enfance…. Le médecin, l’infirmier, l’assistante sociale, l’avocat prennent plus facilement l’image de la sollicitude maternelle, de « pourvoyeur de mieux être », à moins que ce soit au contraire une image « d’autoritarisme », de « castrateur »… Tout dépend de l’empreinte mnésique du vécu du patient.
Cependant, la situation clinique dans le cabinet du psychanalyste est propice à l’apparition de ce type d’attitudes transférentielles et surtout à leur lecture psychothérapeutique. C’est en cela que l’amour, le désir, la curiosité, l’agressivité, la peur… que le patient peut ressentir envers ces professionnels sont, en fait, la répétition de « ressentis » qui ont eu lieu envers un personnage important, de son passé et non pas envers le professionnel qui est en face de lui.
Plus le professionnel sera dans une attitude « neutre » envers son patient, plus le transfert sera « parlant » pour le psychanalyste.
On lit, souvent, qu’il existe un transfert positif et un transfert négatif. Il serait peut-être plus exact de parler d’émotions agréables ou désagréables qui se dégagent à travers ce processus. Car en effet, ce n’est pas le transfert qui est négatif ou positif mais le type d’affects mis en jeu.
Le transfert est toujours positif quant à sa valeur intrinsèque, car c’est un outils psychothérapeutique et psychanalytique. Son analyse aide le professionnel à mieux appréhender les réactions au quotidien de la personne qui consulte. C’est donc aussi (et surtout) l’analyse du transfert et non le transfert tel quel qui a un effet bénéfique pour le patient dans son travail.
Par exemple, des émotions trop positives lors des premières consultations seront le plus souvent suivies, trop rapidement, d’émotions négatives envers le praticien.
De même, la permanence d’un transfert trop massif d’émotions (agréables ou désagréables) peut provoquer la rupture de la relation thérapeutique ou des passages à l’acte de la part du patient.
Il nous semble donc particulièrement important de construire peu à peu et sans précipitation aucune, une alliance thérapeutique entre le patient et son thérapeute.
En aucun cas, il n’est possible de réduire le temps nécessaire et spécifique à chaque patient et qui lui est indispensable pour sa propre évolution.
Le contre transfert chez le « pseudo psychothérapeute », « coach » ou « aidant » non formé
Si le transfert est un merveilleux outils thérapeutique entre les mains de professionnels formés, il peut devenir une arme redoutable, au dépend du patient, dans le bureau des pseudo psycho-thérapeutes auto-proclamés.
La médiatisation actuelle du problème ( janvier 2004) fait penser qu’il serait possible que, peut-être, l’état français demande dorénavant aux personnes non « psychologues cliniciennes » ou non « psychiatres » un minimum d’études dispensées par des universités françaises exclusivement. Une nouvelle fois, afin de contourner de l’obligation de faire des études, certains préfèrent maintenant changer de catégorie dans les pages jaunes et de passer instantanément de « psychothérapeute » à « coach bien être », « énergéticien », « psycho-praticien », « naturopathe »… » .
Identifier un charlatan opportuniste
Nous n’envisagerons ici que quelques situations parmi d’autres qui vous aideront, nous l’espérons, à identifier les personnes peu scrupuleuses quelque soit la fonction qu’elles veulent bien s’attribuer, à travers le nouveau « nom professionnel » qui sera alors à la mode. Nous rappelons à toutes fin utiles que seul le titre de « psychologue’’ sanctionne un diplôme en psychologie de haut niveau – master2 ou doctorat -, et seul le titre de psychiatre sanctionne un diplôme en psychiatrie -doctorat -. Les seuls termes de « psychanalyste » et « psychothérapeute » ne rentrent pas non plus dans ce cadre.
Le pseudo titre : Ce »nom professionnel » donnera une image ou sérieuse du profil de l’individu, suscitera l’idée qu’il a fait des études qualifiantes mais ne devra évidemment, n’ avoir aucun statut officiel afin de ne devoir requérir aucunes obligations d’ordre scientifique, éthique, déontologique pour le charlatan opportuniste vis à vis de la loi française.
Un faux psychothérapeute prendra pour lui les sentiments que son client dira éprouver pendant une séance. (il s’agit en fait du processus de contre transfert)
Si ce sont des sentiments hostiles qui émanent du « client », le charlatan peut lui répondre avec agressivité voire violence car il se sentira « agressé » personnellement.
Si, au contraire, le client évoque de l’amour ou du désir, sentiments normaux comme nous l’avons vu dans le cadre transférentiel, (« vous êtes l’homme idéal », j’aurais aimé avoir une mère comme vous » par exemple), le charlatan pourra lui répondre dans le même registre, pensant là aussi que c’est vraiment à sa personne que sont destinés ses sentiments…
Ce comportement non professionnel peut-être soit la preuve d’un manque de connaissance à minima de la théorie freudienne, soit la preuve d’un comportement flagrant de pervers manipulateur et d’escroc, ou les deux.
Certains ont profité du désarroi des clients en grande souffrance pour leur faire croire à un intérêt extra-professionnel à leur égard, une amitié, un amour, et même avoir des rapports sexuels avec eux sous le prétexte que cette activité serait la réponse thérapeutique à leur problématique !
Le charlatan manipulateur peut aussi désirer, d’une manière insidieuse, prendre la place, dans le réel, du père ou de la mère de son client ; Par exemple, il pourra lui donner toutes sortes de conseils, voire d’injonctions pour diriger sa vie : (« vous devez divorcer », « vous devez quitter votre job », « vous devez porter plainte » « vous devez tout me dire, rien me cacher », « vous devez vous habiller plus jeune ou vous maquiller autrement » vous devez agir de telle manière, répondre comme cela, etc…)
Le charlatan donnera sa propre opinion sur un thème et n’acceptera pas que le client soit en désaccord. Il pourra même l’inciter à la faire sienne.
Le charlatan pervers pourra aussi dévaloriser l’être en souffrance, chose particulièrement lâche et aisée dans ces situations.
Dans un cadre de soins, ce type de comportements est une faute professionnelle particulièrement grave (impliquant souvent la propre psychopathologie du dit « pseudo professionnel ».
En effet, la personnalité narcissique du faux thérapeute peut ne plus avoir de limites dans l’intimité de son « cabinet » et grâce au « savoir » que lui confère son client à la vue d’une belle plaque brillante sur la porte de la salle d’attente ou d’un titre « ronflant » .
Le pseudo thérapeute pourra parler de sa vie, de ses problèmes, de ses expériences et donc ne rien « entendre » de la « demande » du patient qui est devant lui. Il adaptera son discours à ce que son client veut entendre ou lui trouvera sa solution.
En bref, le « charlatan » éprouvera le besoin de se valoriser, d’imposer son « désir » et de profiter de la fragilité psychique de son client qui devient alors sa victime. Il lui inculquera SA manière de penser qu’il présentera comme LA vérité découlant de SON savoir supposé sur la situation vécue par la personne qu’il reçoit.
Il confisque ainsi la « parole » de la personne qu’il reçoit.
Nous sommes là sur le terrain de la manipulation psychique et il est évident que ces exemples n’ont rien d’exhaustifs.
Selon le degrés d’incompétence et le type de psychopathologie dont souffre le charlatan, il pourra « construire » des pseudo preuves de son efficacité qui le conduira parfois à inventer des fondements fantaisistes d’une nouvelle méthode de soins. Il vous suffit de « surfer » sur le net pour constater la prolifération de pseudo « formations » en méthodes en tous genres dites « thérapeutiques » ou de « bien-être intérieur » dans les forums, « chats », les réseaux professionnels et les publicités.
Le stade suivant peut être la mise en place par le « gourou » d’une école qui procure, moyennant finances, des diplômes à ses « fans » devenant rapidement des disciples.
Le « thérapeute-gourou » pourra aussi vous vendre « sa théorie personnelle » sous la forme de livres ou CD souvent édités à compte d’auteur (édités par lui même). Internet permet, à cet effet, d’avoir de nombreux « contacts » facilitant la manipulation mentale des personnes isolées et le recrutement de nouveaux « élèves » qui deviendront eux mêmes des recruteurs.
Les réseaux professionnels (commerciaux) procurent des autoroutes à ces vendeurs. Certains vous proposeront aussi de leur « présenter » des clients et vous proposeront une « bonification » (vente pyramidale interdite en France).
Les forums, les réseaux professionnels ou d’aide, les sites de médecines parallèles grouillent de personnes peu scrupuleuses et souvent dangereuses pour des êtres en situation de détresse, de rupture affective ou professionnelle, de dépression. La lecture de certains « profils » ou « présentations » fait froid dans le dos. De nombreux cas de manipulations, de harcèlements psychiques, de rumeurs sur des sites où l’on a beaucoup d’amis, commencent à être médiatisés. La solitude où la victime se trouve derrière son écran peut gommer toutes barrières jusqu’à la tentative de suicide.
Pour le « client » victime de ces individus, ces manières d’agir, qu’on appelle parfois « rapt du transfert » et qui n’est donc qu’une manipulation mentale parmi d’autres, peuvent avoir des conséquences désastreuses au niveau psychologique (et pécuniaire !)
Lorsque la relation psychothérapeute/patient dérive concrètement sur une relation copain/copine ou maman/enfant ou encore vendeur/acheteur, le client est trompé, manipulé et se retrouve « objet » de la perversion du faux thérapeute. Le manque de législation en la matière et les articles contradictoires dans une même loi en France, permette au thérapeute auto proclamé de « poser sa plaque », à partir du moment où il paie des impôts !
Conseils du CIGAP.ORG
Il est important pour une personne, ressentant le besoin de se faire « aider », qu’elle aille consulter un professionnel de la psyché,
qui soit au minimum diplômé en psychologie clinique par l’université (minimum master 2 dans cette discipline pour diagnostiquer et soigner les patients) et donc qu’il porte le titre de psychologue pouvant être suivi de psycho-thérapeute ou psychanalyste,
Dans tous les cas, le patient doit rester à l’écoute de ses sensations profondes et fuir le « psycho thérapeute » s’il a le moindre doute sur sa probité.
Tout professionnel digne de ce nom, répondra à vos questions sur ses diplômes et expériences.
Fuyez les explications vagues ou non vérifiables.
D. Serrano Fitamant Psychologue clinicienne Psychothérapeute d’orientation analytique
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