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Un rapide tour d’horizon sur l’histoire, sur la culture et sur la religion du Vietnam nous permet d’interroger l’identité dans sa dimension plurielle.
Manifestement, cette dimension a été façonnée par les situations de conflits ou de tensions internes dues en grande part à l’histoire sociale, politique et coloniale mais aussi culturelle voire religieuse.

Aspect identitaire, aspect culturel

Or, il nous semble impossible de dissocier l’aspect identitaire, et plus précisément l’identité nationale, de l’aspect culturel.

Afin d’appuyer nos propos, nous conservons en mémoire les conclusions de la conférence organisée à Mexico par l’UNESCO en 1982 sur l’identité culturelle.

Les liens étroits qui unissent l’identité et la culture se présentent en ces termes :

1 Chaque culture exprime l’âme d’une nation et fixe certaines valeurs immuables. Chaque peuple marque sa présence sur terre grâce à sa culture.
2 Un pays prouve son indépendance intellectuelle grâce à la clarté de son identité culturelle ; par contre, l’ par une culture opposée détruit l’identité nationale.
Le sentiment identitaire est plastique, en ce sens où les soubresauts identitaires contemporains doivent se comprendre en combinant les dynamiques du présent et les leçons de l’histoire et particulièrement l’histoire dans son aspect pluriel. En effet, la plupart des mouvements identitaires aiment à se donner des racines, des mythes et à s’inventer des filiations.

Ces soubresauts tiennent lieux de crises identitaires résultants de cristallisations, de frustrations et de tensions. Ces dernières signent l’émergence de ce que nous nommons l’aspect plastique de l’identité.

Cette caractéristique permet aux générations de se forger ou de redécouvrir des référentiels culturels en lieu et place de l’accommodement initial.

Tentative de définition de l’identité

L’identité se définit par « ce qui fait qu’une chose est exactement de même nature qu’une autre ».

C’est donc la notion du « même » qui est convoquée, de l’identique.

Puis, c’est « le caractère permanent et fondamental de quelqu’un, d’un groupe ». Ici c’est le caractère intrinsèque tant singulier que collectif qui est énoncé.

Ensuite, c’est la « conviction d’un individu d’appartenir à un groupe social, reposant sur le sentiment d’une communauté géographique, linguistique, culturelle et entraînant certains comportements ». Il s’agit là de l’appartenance et de la culture, en convoquant un double critère, celui de la norme et de l’universalité, selon Lévi-Strauss.

Et enfin, c’est un ensemble de données de fait et de droit qui permettent d’individualiser quelqu’un. Ici c’est la différenciation, l’individualisation qui prédomine.

La notion d’identité, en bref, relève à première vue de critères contradictoires :

unique/même,
individuel/social et
indifférenciation/individuation.
Or, en y regardant de plus près, nous pouvons déterminer que ces contradictions constituent davantage un point de ralliement nécessaire à l’émergence de l’identité du .

En effet, pour que l’identité du singulier puisse advenir, l’individu doit pouvoir s’identifier en partie avec autrui.

« Autrui » constitue, d’une part la base de l’émergence de l’identité et d’autre part inscrit le sujet dans une Institution.

C’est ce qui convoque la place du sujet dans une société donnée, dans le processus de socialisation nécessaire pour qu’advienne le sujet singulier et social.

Pas d’identité unique sans inscription sociale

Pas d’identité unique, singulière sans inscription sociale à entendre dans le lien intersubjectif avec autrui et l’institutionnalisation (intégration des normes et valeurs).

Sortir de l’indifférenciation pour tendre vers l’individuation, nécessite la prise en compte de l’environnement externe, c’est passer du dedans au dehors, de soi vers autrui et de soi vers le groupe.

Le père est celui qui fait sortir l’enfant de son état d’indifférenciation. Il l’amène à prendre connaissance et conscience du monde qui l’entoure.

Le père a, ainsi, une fonction séparatrice : c’est par lui qu’est transmis l’interdit de l’, adressé à la mère et à l’enfant. Cette fonction permet à l’enfant de ne pas être totalement assujetti au « champ maternel« .

C’est l’inscription de la Loi dans sa dimension psychique qui permet la constitution et le développement du sujet.

A notre sens, l’identité c’est cette part qui constitue le sujet en tant qu’individu singulier et unique. Mais il requiert aussi des identifications avec Autrui. Il permet l’inscription du sujet dans la société et le groupe auquel le sujet adhère et appartient, tout en ne se perdant pas dans le seul regard de l’Autre, des Autres.

Ainsi, la valeur d’unicité ne prend sens que dans le rapport que le sujet entretient avec autrui, dans la place réelle ou fantasmatique qui lui est attribuée dans la société et dans le discours de l’autre.

Un temps d’identification à l’autre est primordial. Ce temps permet de se constituer une identité sous un socle solide pour tendre vers la singularité.

Ce sont donc le système social, la temporalité (époque) et la culture qui permettent de définir, à l’aide de termes spécifiques et de rites particuliers, la place de l’individu et les liens qu’il entretient au sein d’une société donnée.

Le Vietnam terre de conflits

Le Vietnam a vécu sous la domination chinoise durant plus de 1000 ans (111 av. JC – 938 ap. JC.). Cette dernière prit fin en 939 ap. JC avec la célèbre victoire de Bạch-Đằng par Ngô-Quyên.

Pendant X siècles, huit dynasties vont se succéder. La dernière dynastie est celle des Nguyễn (1802 – 1945).

Nguyễn-Ánh, se proclama empereur en 1802 et pris comme nom de règne celui de Gia-Long, il adopta comme appellation nationale celle de Vietnam, pour bien signifier qu’elle englobait à la fois les territoires de l’ancien Annam (le Tonkin proprement dit) et le Viêt-Thuong correspondant à l’ancien Champa, auquel devait s’ajouter la Basse-Cochinchine.

La colonisation Française

Mais avec la colonisation Française le Vietnam est à nouveau scindé en trois parties :

1 le Tonkin au Nord,
2 l’Annam au Centre et
la Cochinchine au Sud.
Après plus de 10 ans d’affrontement, la victoire des việt minh débouche sur les accords de Genève, du 21 juillet 1954, qui scinde le territoire en deux parties selon une ligne de démarcation constituée par le 17e parallèle.

Les provinces du Nord relèvent désormais de la République Démocratique du Vietnam, tandis que les territoires situés au Sud passent sous la juridiction de l’Etat du Vietnam, ensuite sous celle de la 1ère République du Sud Vietnam (26 Octobre 1956) – par un référendum populaire – et enfin sous celle de la 2nd République (1 Novembre 1963) – suite au renversement du régime dictatorial de Ngô-Đình-Diệm.

S’ensuit une guerre fratricide Nord-Sud qui aboutit en 1973 aux Accords de Paris mais qui n‘interrompt pas pour autant le conflit. Le 30 avril 1975, la chute de Saigon marque la fin du conflit. En 1976, c’est la proclamation de la République Socialiste du Vietnam.

L’unification

Vers une unification nationale vietnamienne sous le modèle socialiste.

Après plus de vingt ans de conflit, la réunification des deux états en un seul pays soulève la question de la confrontation Nord-Sud. Cette dernière relève essentiellement d’une dimension politique – à savoir idéologique, économique et socioculturelle – en totale contradiction avec le système Sudiste.

Comme le soulève Marie-Sybille de Vienne, les systèmes économiques des deux états étaient antithétiques :

au Nord prédominait un système prolétaire et paysan,
au Sud prédominait un système marchand et compradore.
La collectivisation des productions et du négoce a entraîné une dégradation économique du pays. Ce qui obligea le pouvoir à lancer, en 1986, une politique dite de « renouveau » [công cuộc đổi mới] afin de sortir de la .

Cette politique d’ « économie de marché à orientation socialiste » marque un tournant économique. Malgré cette tentative économique, la tutelle politico-administrative septentrionale reste de mise sur la partie méridionale.

C’est bien le sens sous tendu par l’énoncé d’une « économie de marché à orientation socialiste » à savoir une ouverture économique sous le contrôle de l’autorité du parti. Ce premier paradoxe entre les discours néolibéraux et un verrouillage économique étatique signe l’imposition du système politique et idéologique de la partie septentrionale sur la partie méridionale. Cette imposition sera ce qui constitue le « trait-unaire » vers une unification nationale.

Outre cette politique économique et idéologique, apparaît aussi une politique culturelle. En fait, il s’agît d’une politique de « culture avancée » c’est-à -dire une culture sous le prisme socialiste.

Cette politique tend à combiner les diversités ethniques et culturelles sous l’égide d’une unicité du sentiment d’appartenance à un seul peuple et à une seule culture celle de la « vietnamité » incarnée par le régime politique de Hà Nội.

Jusqu’à la politique du đổi mới (renouveau) les fêtes et les cultes traditionnels ont subi une certaine régression de par le nouvel aménagement des espaces collectifs (villages) et de la politique de collectivisation.

Depuis la fin des années 1980, la vie culturelle reprend un certain essor avec l’appareillement des exigences socialistes et de la population, et plus précisément de la manne financière que génèrent ces festivités.

La question ethnique

Au niveau de la question ethnique, les ethnologues de Hà Nội ont répertorié 54 groupes en 1979.

Les critères étaient les suivants :

1 la langue,
2 les caractéristiques culturelles,
3 l’auto-identification.
A l’égard des minorités établies, la politique tend à un certain respect des droits des minorités tout en exigeant leur intégration dans la nation.

Le socialisme : le socle de l’identité

En bref, nous pouvons dire que face à la question ethnique, la référence stalinienne est de mise à savoir : droit à la différence ethnique à l’intérieur des structures du nationalisme.

Ce second paradoxe entre les diversités (culturelles et ethniques) qui constituent l’essence même du Vietnam et la tentative d’unicité marque la prégnance du parti à s’afficher comme l’acteur incontournable de la vie sociale.

Ainsi, suite aux deux paradoxes présentés brièvement, nous voyons dans la recherche d’une identité vietnamienne l’omniprésence de la politique dans l’émergence d’une identité nationale.

C’est la difficile tentative de concilier ouverture commercio-culturelle nécessaire à la survie du Vietnam avec un système politique unique et légitimé par un discours socialiste.

Etre vietnamien, ce n’est plus comme dans le passé appartenir à la majorité ethnique celle des Việt mais c’est partager un idéal exclusivement incarné par le parti.

Le socialisme devient ainsi le socle de l’identité nationale vietnamienne.

PAR VICTOR HOANG, PSYCHOLOGUE CLINICIEN,
DOCTORANT EN PSYCHO-PATHOLOGIE CLINIQUE, FRANCE -VIETNAM
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